L'émigration des gens du Québec vers les État-Unis 

        par Richard Bélair, 2008

An english version is in construction on the following page: Emigration from Québec

Introduction:

L’émigration vers les États-Unis de 1840 à 1930 n’est pas un phénomène unique au Québec. En 1900, 14% de la population des États-Unis était composée de gens nés dans un pays étranger1. Presque un million de Québécois vinrent s’installer dans le Nord-Est des États-Unis durant cette période. Une étude comparative de l’histoire des immigrants canadiens français en Nouvelle-Angleterre et de celle de leurs “cousins” du Québec est stimulante dans la mesure où la Nouvelle-Angleterre est à forte proximité du Québec, qu’une forte proportion de la population de celle-ci découle du Québec2 et que la langue et la culture canadienne française ont perduré aux États-Unis beaucoup plus longtemps que celles d’autres groupes ethniques3.

Ce travail tente de cerner les éléments permettant de comprendre l’aventure de l’immigrant canadien français en Nouvelle-Angleterre en la comparant à celle du québécois qui est demeuré au Québec. Plusieurs pistes sont apparues, mais plusieurs problèmes vinrent compliquer cette recherche. Il fut facile de dégager un modèle commun. Il fut plus difficile d’isoler les différences spatiales et temporelles. Une étude chronologique s’imposait, mais avec certaines limitations. Les comparaisons quantitatives étaient simples, mais les comparaisons qualitatives beaucoup moins évidentes et souvent subjectives. Je me suis donc fié à l’interprétation faite par les historiens et aux écrits des élites et écrivains de cette période. Pour permettre une comparaison juste et valable, j’ai dû limiter les comparaisons entre la vie dans une ville comme Montréal et la vie dans des villes d’une certaine grandeur comme Fall River, au Massachusetts ou Woonsocket, au Rhode Island4.

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110,341,276 personnes nées à l’étranger sur une population totale de 74,212,168 en 1900, selon le U.S. Bureau of the Census (Gibson, table 14).
2En 1990, on estime que 13.4% de la population de la Nouvelle-Angleterre sont de descendance francophone (Quintal, p. 579).
3Selon Dean Louder, “grâce à la solidité de leurs structures institutionnelles...”(Louder, p. 78). En 1991, près de 7% de la population du New Hampshire et du Maine parlent encore français (Quintal, p. 568).

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Dans un premier temps, j’ai donc dressé un tableau comparatif et chronologique en tentant de cerner les événements historiques pertinents (Tableau V, page 20). J’ai porté mon attention sur la langue, la religion, la culture, le pouvoir et la santé tout en essayant de regarder l’évolution des contextes économiques, démographiques et sociologiques. Je tenterai de répondre à la question que tout immigrant se pose: “ l’établissement permanent des Canadiens français aux États-Unis fut-il un dans leur meilleur intérêt?” Louder écrit d’ailleurs:

L’étude des Franco-Américains constitue un domaine qui relève de l’histoire des États-Unis [...]. Car on peut difficilement concevoir l’étude d’une population immigrante [...] qui écarte les réalités structurelles et conjoncturelles de la société d’adoption (Louder, p. 8).

I) LE DÉPART DU QUÉBEC:

Pour bien cerner l’étendue du problème de l’émigration vers les États-Unis je vous réfère au tableau II, page 17. Le vrai taux d’émigration fait l’objet de discussion parmi les historiens. La proportion relative des francophones ayant quittés le Québec, entre 1840 et 1930, est près du pourcentage de 35% de la population francophone totale de 19315.

Il faut prendre le temps de se pencher sur les raisons motivant ce départ pour mieux comprendre la société franco-américaine qui en découla. Plusieurs textes font ressortir les points majeurs et en expliquent les détails. Yves Roby écrit “c’est essentiellement la misère, la famine dans certains cas, et l’incapacité des autorités québécoise à résoudre leurs problèmes qui les ont poussés à l’exil” Dans son texte, avec une pointe d’ironie, il soulève un point très important; l’élite québécoise distingue deux types d’immigrants aux États-Unis: “un qu’on peut excuser, le nécessiteux”et “un autre qu’il faut déplorer, l’opportuniste” (Roby, p. 43). La majorité des émigrants provenait du milieu rural

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4Respectivement troisième et quatrième villes françaises d’Amérique, en 1900, après Montréal et Québec (voir Tableau I, page 16, population et rang de certaines des plus grandes villes des États-Unis).

5Émigration totale de 900,000 Québécois représenterait près de 35% de la population francophone du Québec en 1931, laquelle était estimée à 2,444,000 (soit 85% X 2,875,000 personnes vivant au Québec en 1931), extrapolation en utilisant les travaux de Yolande Lavoie et Rudin. (LAVOIE, p.53 et RUDIN, p. 28).

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En bref, les principales raisons sont le surpeuplement rural, la spéculation et le con- trôle des terres par les grands propriétaires, l’opposition des propriétaires forestiers à la colonisation, le manque de chemins pour étendre la colonisation, la propagande positive des Franco-Américains6 et des recruteurs de main-d’oeuvre, la différence des revenus et du niveau de vie, sans oublier les faiblesses du gouvernement (Quintal, p. 15). Suite à ce mouvement majeur de la population l’élite religieuse, médicale, intellectuelle et commerçante avait l’obligation morale de suivre (même si pour certains, l’intérêt était de nature seulement financière).

Certains auteurs jettent en partie le blâme sur les anglophones. Perreault écrit que ces motivations de départ incluaient aussi le fait que les Canadiens de langue anglaise détestaient les Canadiens Français leur laissant peu de possibilité de survie dans une ville comme Montréal (Perreault, p. 10).

II) L’ARRIVÉE EN NOUVELLE-ANGLETERRE:

Dans ce chapitre, je désire examiner de plus près la destination des immigrants canadiens français et résumer les éléments qui motivèrent ceux-ci à s’installer dans les États du Nord-Est. De 1840 à 1860, les déplacements étaient coûteux et lents. Les Québécois choisirent donc de préférence les États près de la frontière. Avant 1840, le concept de frontière entre la Canada et les États-Unis était loin d’être très évident pour les habitants des territoires en question7. Il n’est donc pas surprenant de retrouver des francophones dans le Nord des États du Maine, de New York, du Vermont et du New Hampshire. Les migrations étaient souvent saisonnières (coupe du bois l’hiver). Mais à partir de 1840, l’immigration francophone fut plus significative. Ils venaient travailler

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6Yves Roby définit les Franco-Américains “comme ceux qui acceptent de conserver les caractéristiques essentielles de l’Héritage ancestral (langue et religion)” (Roby, p. 12). Il écrit: “par besoin, mais aussi par conviction, ils ont choisi de rester catholiques, de langue française et de conserver les traditions et coutumes de leurs pères. Mais, ils deviennent Américains de coeur et d’esprit. Ils sont des Franco-Américains” (Roby, p. 114). Il ajoute à sa définition, pour mieux répondre à l’évolution du début du XXième siècle, le concept d’être citoyen américain ce qui implique “ la naturalisation et l’apprentissage de l’anglais” (Roby, p. 278).

7L’acte d’Union formant le Canada-Uni fut ratifié en 1840. Les querelles au sujet des frontières (surtout relatives à la frontière du Maine), se poursuivirent jusqu’à la signature du traité Webster-Ashburton, en 1842.

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dans les usines de brique et de marbre, sur la ferme ou dans l’industrie du bois ou dans les usines de coton près de Burlington. Jusqu’en 1860, 44% des immigrants se dirigeait vers le Vermont8. Avec la venue des chemins de fer vers 1848, il fut plus facile d’avoir accès aux États du sud; Massachusetts, Rhode Island et Connecticut (Quintal, p. 89). L’arrivée massive des Canadiens français dans les villes du sud de la Nouvelle-Angleterre débuta vraiment après 1860.

L’opportunité de travailler, les meilleurs salaires et conditions de vie, le boum économique à la fin et après la guerre de Sécession expliquent l’intérêt particulier pour cette région (Roby, p. 25). Le nombre d’immigrants Canadiens Français au Massachusetts passa de 7,780, en 1860, à 250,024, en 1900 et finalement à 336,871, en 19309 (je vous réfère aux Tableaux III et IV, pages 18 et 19). Le nombre total de Franco-Américains est beaucoup plus élevé que ce nombre. Roby souligne fort bien qu’il faut inclure les descendants des immigrants (les troisième et quatrième générations) pour avoir une meilleure perception de la situation (Ibid., p. 167). Un coup d’oeil aux statistiques permet de saisir l’ampleur du phénomène; en 1900, la population d’origine canadienne française dans le Nord-Est des États-Unis est estimée à 1,200,000 (43% étant né au Canada), alors que la population francophone du Québec est de moins de 1,800,000 (la population du Québec a malgré tout elle-même triplée de 1850 à 1930 suite à la tentative de “reconquête” du Canada par “la revanche des berceaux”) (Ibid., p. 56).

La carte I, page 15, reproduite du livre de Claire Quintal, permet de bien visualiser la localisation des Franco-Américains en 1900 et le pourcentage de la population totale (voir aussi Tableau I, page 16 et Tableau IV, page 19). La concentration des immigrants dans le sud de la Nouvelle-Angleterre et dans des villes spécifiques s’explique par plusieurs facteurs; le support social d’amis ou

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8Roby explique que l’historien Mason Wade appelle cette période “l’âge noir des Canadiens français”, “puisqu’ils sont privés du support du clergé” au début de cette vague d’immigration (Roby, p. 30).

9Claire Quintal dans, Steeples and smokestacks , décrit bien le “Settling-In Process” (Quintal, p. 89).

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membres de la famille, la présence de paroisses et structures sociales supportées par le clergé et similaires à celles du Québec, la possibilité de vivre en français, la facilité d’obtenir du travail non spécialisé. Ces endroits recevront l’appellation de “Petits Canadas”10. Plusieurs élites du temps pensent: “ils n’ont pas quitté la patrie, ils l’ont agrandie” (Roby, page 111). De là surgit, dans les années 1900, le conflit au Canada français entre étendre “le fait français” et la religion au-delà de la frontière ou lutter contre l’exode et l’affaiblissement des effectifs francophones au Canada et du Québec dans l’Union canadienne. Cet apport continuel de nouveaux immigrants simplifie et favorise la “survivance” (Ibid., p. 56). Ce processus se poursuivra jusqu’en 1930. Suite au “crash” boursier de 1929 et à la loi américaine anti-immigration, le mouvement cessa. Un mouvement de retour au Canada de certains des immigrants s’ensuivit. L’ampleur de ce retour est mal quantifiée, certains historiens parlent de 100,000 Canadiens français (Lavoie, chap. IV).

III) LA VIE AUX ÉTATS-UNIS: “LA SURVIVANCE”11

Il est intéressant de comparer les conditions de vie des Franco-Américains de cette période aux Canadiens français ayant demeurés au Québec. La comparaison est fort complexe. Les historiens, politiciens et écrivains semblent souvent avoir dramatisé la situation des Franco-Américains en comparant leur situation à celles des autres immigrants des États-Unis (exemple: lenteur à s’assimiler et à monter dans l’échelle sociale comparativement aux Irlandais ou Libanais12), tout en blâmant ce manque d’ascension dans l’échelle social sur le désir de “survivance” du peuple Canadien Français

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10Roby introduit le concept de “petits Canadas” à la page 30 de son livre.

11Louder définit les aspects de la survivance: la paroisse, la vie familiale , l’école, la presse, la langue. Il inclut la naturalisation et l’américanisation. “La paroisse fut le grand pilier de la survivance active” (Louder, p. 57, 63) 

12Je vous réfère au travail d’Amy E. Rowe comparant les Franco-Américains aux Libanais de Waterville.

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et leur tendance à considérer leur présence aux États-Unis comme temporaire13, personne ne semble avoir comparé leur situation à la progression sociale des francophones du Québec (qui fut somme toutes aussi très difficile). Roby cite Honoré Beaugrand14 qui écrit “l’émigrant franco-canadien vient donc et demeure aux États-Unis parce qu’il y gagne sa vie avec plus de facilité qu’au Canada. Voila la vérité dans toute sa simplicité” (Roby, p. 43). Les conditions dans lesquelles ils vivaient aux États-Unis “surpassaient la pauvreté dans laquelle ils avaient vécu au Canada” (Perreault, p. 13). “Les centres industriels de la Nouvelle Angleterre, malgré la pollution de l’air et par le bruit, offraient des conditions de vie fort supérieures à celles du Québec” (Ibid., p. 16). Pour plusieurs, les seules options étaient de choisir entre être “Chinois de l’Est” aux États-Unis ou “nègre blanc d’Amérique” au Canada (allusion au livre de Pierre Vallières).

Pour permettre une comparaison face à l’ouvrier de Montréal, ces quelques lignes du livre de Marcelle Brisson et Suzanne Côté-Gauthier, “Montréal de vive mémoire: 1900 à 1930", résument bien la situation:

...la plupart des manufactures à Montréal appartiennent aux Anglais, aux Écossais et aux Juifs. [...] La maîtrise de la langue anglaise [...] permet quelquefois d’obtenir un poste de contremaître ou de contremaîtresse, mais rien de plus important. [...] L’état d’insalubrité de nombreux lieux d’habitation, [...] les nombreuses industries [...] très polluantes. […] le nombre des égouts est insuffisant, le lait est rempli de microbes (Brisson, p. 171 et p. 294).

Dans le même ordre d’idée, Kenneth McRoberts et Dale Postgate écrivent dans “Quebec: social change and political crisis“:

...the following impression in 1899: in the City of Montréal [...] it is well known that, man for man, the average income of the French-Canadian is perhaps not one-fourth that of his British

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13Je vous réfère à l’extrait du douzième rapport annuel du Bureau des statistique du travail du Massachusetts (1981) qui décrit de façon fort négative l’ouvrier canadien français, le qualifiant de Chinois de l’Est. Cité et traduit par Pierre Anctil dans Chinese of the Eastern Sates, 1881 (Roby, p. 61).

14Texte tiré du livre d’Honoré Beaugrand, La fileuse, Montréal, 2éd. (1ère éd. 1878), Les Presses de la Patrie, 1988, p. 190 (Roby, p.43). Honoré Beaugrand (1848-1906),journaliste, propriétaire de journaux, homme politique, ainsi que maire de Montréal vécu aux États-Unis, entre autres à Fall River, où il fut un personnage important. À un certain point, il prônait l’annexion du Québec aux États-Unis (Quintal, p. 414)

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neigbhour (p. 21) [...] (Citant Everett Hughes qui étudie sur les villes industrielles du Québec, il écrit) It is in the upper ranks of the industry that one finds the English[...] people of french culture are in the lower ranks ( Posgate, p. 37).

Ces deux livres démontrent les conditions de vie difficiles des travailleurs à Montréal et justifient le départ des Canadiens français vers la Nouvelle-Angleterre et leur espoir d’une vie meilleure. L’étude de l’intégration sociale des Franco-Américains m’amène à souligner la critique de l’élite faite par Ashley Douane, dans une thèse de sociologie de l’Université du New Hampshire que je traduis ainsi: “ le clergé, les professionnels, les marchands qui étaient les vrais bénéficiaires de ce maintient de la culture. Généralement bilingue, l’élite jouissait d’un haut niveau social dans ce milieu fermé, une position dépendant directement du maintient de la communauté ethnique” au niveau où elle était (Louder, p. 64). Dans ce même livre de Louder, Pierre Anctil (dissertation en anthropologie à “the New School for Social Research”) est cité et introduit le concept de “la petite bourgeoisie imposant son idéologie sur les travailleurs industriels muselés ou impuissants”15 (Ibid., p. 89). Anctil encore cité écrit et je traduis: “presque nulle part aux États-Unis une ségrégation complète et une isolation du prolétariat de race blanche et pauvre n’a été accomplit avec des résultats si manifestes...”(Ibid., p. 87).

Louder souligne aussi l’idée émise par Julia Schulz dans sa thèse d’anthropologie de l’Université McGill, que même les propriétaires (anglophones) d’usines de filature favorisaient le maintient des Franco-Américains dans une classe sociale inférieure, unilingue francophone, pour préserver les qualités qui en faisaient de bons employés. C’est à dire leur docilité, le fait qu’ils acceptent de travailler de longues heures dans des conditions difficiles à un salaire très bas. De plus, ils acceptaient de faire travailler leurs enfants et pouvaient se déplacer ailleurs ou retourner au Canada s’il y avait fermeture temporaire des usines. Schulz émet l’opinion d’une connivence

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15Quintal cite Anctil: “The emerging French-Canadian petite bourgeoisie in Woonsocket... developed the survivance ideology to create a kind of state within a state in order to further its own interest. These middle-class entrepeneurs fought assimilation because it would destroy their monopoly over their working-class clientele.” (Quintal, p.83).

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entre le clergé et les propriétaires d’usines pour maintenir l’identité ethnique telle qu’elle était pour mieux l’exploiter. De là, on peut conclure que l”aculturisme” des Franco-Américains servaient bien l’élite tant francophone qu’anglophone (Ibid., p. 91). On peut résumer le Franco-Américain en quelques mots: il est soumis, pauvre, analphabète, accepte n’importe quel salaire, mobile, anti-syndical et viole les lois sur le travail des enfants (Roby, p. 95 et Quintal, p. 77). Situation singulièrement analogue à la situation vécue au Québec par les francophones.

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Section ajoutée pour éclaircir le sujet:


Il ne faut pas oublier que les ''Canadiens'' (Canadiens français au Québec) vivaient sous un régime semi-féodal français (régime seigneurial) depuis le début de la Nouvelle-France à la fin du moyen-âge (le Québec a été fondé en 1608 par Samuel de Champlain; Le moyen-âge qui s’étend sur une période de mille ans se termine théoriquement vers 1453 avec le début de la  Renaissance française, mais en réalité les limites chronologiques ne sont pas aussi évidentes. Pour le peuple, les concepts sociétaires du moyen-âge ont perduré pour beaucoup plus longtemps). Les ''habitants'' avaient l'habitude de laisser à une élite le fonctionnement de la société, tant au niveau de l’éducation, de la religion et de tout ce qui régissait leur vie sociale, y compris l'accès à un moulin à grain dans chaque seigneurie. L'aristocratie médiévale, membres du clergé et seigneurs, contrôlait tout sur le plan sociale, économique et politique. 


On peut dire sans se tromper que les habitants ont préféré un système socialisé (pour ne pas dire socialiste) à un système capitaliste. La vie apparaissait plus simple et plus facile pour la plupart avec le système seigneurial. Ce concept de dépendance persiste de nos jours, où les soins de santé sont gratuits, l'enseignement supérieur est relativement gratuit, la sécurité sociale est disponible pour tous, et où les différents paliers de gouvernement jouent un rôle majeur dans la société québécoise.  


En 1763, les 70,000 habitants français ont accepté de demeurer dans le Nouveau Monde sous certaines conditions, dont le droit de conserver leur culture, leur langue, leur religion, et aussi le régime seigneurial, tout cela dans un continent anglo-protestant hostile. Bien sûr, ce ne sont pas les "habitants" mais l'élite (le clergé et les quelques aristocrates qui ont décidé de rester) qui a négocié les conditions de reddition et les conditions de séjour dans cette partie du nouveau monde considérée comme inhospitalière; les Anglais préférant les colonies anglaises plus méridionales et plus chaudes de la Nouvelle-Angleterre. 


L'Acte de Québec voté en 1774 signifiait donc le maintien de la « Coutume de Paris » en droit civil avec le maintien du régime seigneurial, mais, la pratique anglaise en droit criminel. L'utilisation des paroisses canadiennes-françaises comme contrôle central du mode de vie des Habitants s'est poursuivie pendant de nombreuses années. 

Le régime seigneurial perdurera jusqu'à 1854. Ce n'est qu'en 1935 que l'Assemblée Législative du Québec adoptera la Loi sur l'abolition des rentes seigneuriales. 

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Malgré les crises économiques, telle la récession de 1873, qui frappent les États-Unis, les Canadiens français ne quittent pas ce pays (Roby, p. 47). La situation économique du Canada est tributaire de la situation aux États-Unis (sauf au début de la guerre de Sécession). Comme on en- tend dire souvent: “quand les États-Unis éternue le reste du monde à la grippe!”. Les tentatives de rapatriements du gouvernement canadien furent aussi des échecs.

Vers la fin du XIXième siècle la condition des Franco-Américains s’est améliorée16. Roby écrit: “quelle différence entre cette époque et celle où, trop peu nombreux, les francophones étaient oubliés, méprisés et conspués” (Roby, p. 158). Perreault considère, avec justesse, que la période avant la Première Guerre mondiale est le “Peak of the bicultutal state of being of the Franco-Americans”, la période ayant les “conditions et structures les plus favorables pour la survie de la langue et des coutumes canadienne-françaises en Amérique”(Perreault, p. 26). Aux États-Unis ils pouvaient vivre en français (Roby, p. 158). “Le clergé encadre les fidèles dans de multiples associations” comme au Québec17 (Ibid., p. 83). Lors d’un discours à Worcester en 1915, Henri Bourassa s’émerveille de la force des francophones aux États-Unis. Il écrit dans Le Devoir:

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16Je vous réfère à l’éditorial “The French Canadians in New-England”, du New York Times, 4 juin 1892 qui démontre bien l’éveil des Américains face au pouvoir grandissant des Franco-Américains.

17Les Dames de Sainte-Anne pour les femmes mariées, les Enfants de Marie pour les jeunes filles, la Ligue du Sacré-Coeur pour les hommes, S’y greffe la Société de Saint-Vincent-de-Paul, les Dames de la charité pour les indigents, les sociétés de tempérance pour les alcooliques (Roby, p. 83).

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Les Franco-Américains ont abandonné leurs sales tènements et leurs vilains quartiers aux nouveaux venus portugais, slaves ou hongrois. [...] Les Franco-Américains sont infiniment mieux traités dans toute la nouvelle-Angleterre, que les Canadiens-français [...] dans n’importe laquelle des provinces anglaises du Canada (Bourassa).

Il cite comme exemple M. Aram-J. Pothier, un Franco-Américain, plusieurs fois gouverneur du Rhode-Island18. Par la suite, malheureusement, la situation ne fit que se détériorer. Suite à la guerre mondiale de 1914, le sentiment anti-allemand dégénéra en un sentiment anti-étranger qui affecta les Franco-Américains19. Tout ce qui n’était pas anglais et blanc étant “Un-American” (“Non-Américain”). Les Américains optèrent pour “the anglo-conformity” (Roby, p. 223). “L’affaire sentinelle” qui dura de 1923 à 1929 donnes une idée des tensions de cette époque. Je me contenterai de la résumer de façon très succincte. Il s’agit d’une controverse sur la levée de taxes paroissiales par l’église (contrôlée par la hiérarchie ecclésiastique irlandaise) pour la construction d’écoles catholiques anglaises de niveau supérieur. Les Franco-Américains durent s’y plier (Roby, p. 260). Cette situation démontre un manque de liberté de ces derniers face au contrôle de l’église catholique par les Irlandais. Un événement qui joua contre “le fait français”. Heureusement, ce contrôle de l’église par une autre race ne fut jamais un problème au Québec.

Au même moment, de 1921 à 1926, une autre grande récession au Québec explique une autre vague de départ vers les États-Unis20. S’ensuivit le “crash” de 1929. La fermeture des frontières américaines signifiait l’arrêt de l’apport de nouveaux francophones. La fermeture des usines de filature du Nord des États-Unis forçat la sortie de la main-d’oeuvre “des Petits Canadas”. Le début d'une lutte dure et sans

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18Henry Bourassa ((1868-1952), journaliste et homme politique respecté. Articles publiés dans Le Devoir, septembre 1915.

19Être Américain” est mal compris par les immigrants. Pour les Américains cela représente parler une seule langue, avoir une seule culture, la démocratie, la liberté et remplir ses responsabilités civiles (tel voter).

20Roby présente des témoignages des conditions difficiles au Québec. “Le monde était heureux aux États- Unis. Il y avait de l’argent, de quoi vivre. Au Canada c’était la pauvreté” (Roby, p. 267).

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grand espoir pour la “survivance” venait de commencer21

CONCLUSION:

Il semble que les Franco-Américains se soit bien débrouillés aux États-Unis. La préservation de la langue et de la foi est un succès relatif si on compare la vitesse d’assimilation des immigrants d’autres pays. Par contre, l’ascension sociale et économique des Franco-Américains a probablement été retardée par ce phénomène de résistance à l’intégration au monde anglophone. L’oppression des Canadiens français aux États-Unis ne semble pas seulement un phénomène d’immigration (comme plusieurs immigrants semblent malheureusement devoir souffrir), mais plutôt une forme de destin social commun à tous les Canadiens français depuis la conquête de l’Amérique par les Anglais. Un peuple avec comme idéologie la préservation du français, de la foi catholique et de leur culture avec comme employeur “l’establishment anglophone”. Lequel, de connivence avec l’élite francophone, bénéficiait directement du maintien des francophones dans leur état inférieur. Il est à noter que vers 1910-1920, l’Abbé Lionel Groulx22 fut un des premiers religieux à contester l’idée qui laissait entendre que la Conquête de la Nouvelle-France par les Anglais fut bénéfique et que les Canadiens français devraient, de ce fait, se soumettre au pouvoir anglais.

Il semble bien que la vie du peuple, des travailleurs non instruits dans les usines insalubres de Montréal était similaire pour ne pas dire pire que la vie dans les filatures et ghettos du Sud de la Nouvelle-Angleterre. En fait, aux États-Unis les travailleurs francophones avaient une plus grande facilité à se trouver du travail, la possibilité de se déplacer de ville en ville selon les offres

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21Je vous réfère à une lettre du président Roosevelt au premier ministre du Canada, Lyon Mackenzie King, datée du 18 mai 1942, lui suggérant et lui expliquant comment assimiler les Canadiens français. Une connivence entre les États-Unis et le Canada pour favoriser l’extinction de la culture francophone est-elle probable? D’ailleurs, des lois contre l’utilisation du français à l’école furent votées durant la même période, vers 1915, dans les deux pays (voir Tableau V).

22L’abbé Lionel Groulx (1878-1967), prêtre, homme de lettres, historien, philosophe, défenseur du nationalisme canadien-français au début du 20e siècle. Certains de ses écrits sont disponibles en ligne: <www.vigile.net/ds- groulx/index.html> (03/25/2004).

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d’emplois, une meilleure rémunération et semble-t-il une meilleure qualité de vie que les ouvriers Canadiens français de Montréal. Ces éléments associés à une structure sociale contrôlée par l’église étaient suffisants en eux-mêmes pour générer un état de sécurité financière et sociale annihilant tout désir de retourner au Québec.

L’Église contrôlait presque toutes les écoles, les hôpitaux et la politique sociale comme au Québec. Elle était la force soutenant ‘ la survivance’. Le seul élément qu’elle ne contrôlait pas était relié à la source du travail, même si elle était de connivence avec les employeurs anglophones. Je me pose ainsi la question, quelle serait la situation actuelle des Franco-Américains si le clergé en Nouvelle-Angleterre n’avait pas été contrôlé par la hiérarchie ecclésiastique irlandaise?

La proximité du Québec et l’apport graduel et continuel de nouveaux arrivants aux États-Unis jusqu’en 1930 furent des facteurs décisifs dans le succès de “la survivance” et le bien-être des francophones dans le Nord-Est des États-Unis. Cette proximité créait l’espoir d’un possible retour à la terre natale pour les immigrants récents et donnait une force surprenante aux valeurs inculquées par leurs parents aux générations qui suivirent. 

Claire Quintal résume bien le sentiment de plusieurs historiens sur le sujet lorsqu'elle écrit: “le français n’a évidemment jamais été une nécessité aux États-Unis, sa préservation est un phénomène social surprenant”(Quintal, p 568).

Pour cette raison, ce travail n’est pas terminé, plusieurs questions restent sans réponse. Le problème majeur rencontré fut que les documents sur la période entre 1840 et 1880 s’attardent sur les pauvres conditions de vie des Franco-Américains. Alors que par la suite, les textes accordent trop d’importance à l’avancement industriel et culturel et oublient le peuple. Trigger dit vrai lorsqu’il écrit: “les archives écrites d’une société nous en apprennent plus sur la mentalité de ses classes supérieures que sur celle des paysans et des ouvriers illettrés qui forment la masse de sa population” (Trigger, p. 237). Des travaux plus approfondis de comparaison entre différentes ethnies coexistantes qui se pencheraient sur leurs évolutions sur le plan social, culturel et économique permettraient de tirer des conclusions intéressantes qui modifieraient peut-être notre compréhension de l’histoire...


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Tableau V 

COMPARATIF CHRONOLOGIQUE ENTRE LA NOUVELLE-ANGLETERRE ET LE QUÉBEC

Nouvelle-Angleterre


année


                     Québec

1845-1851: Grande famine en Irlande, “potato famine”, 3 millions de morts, plus d’un million d’émigrés vers l’Amérique durant cette période.

avant

1840

De 1784-1844: la population a augmentée de 400% 

1791: Acte Constitutionnel: Bas-Canada francophone et le Haut-Canada anglophone.

1833: esclavage est aboli dans les colonies britanniques

1837-1838 Rébellion manquée du Bas-Canada, départ vers les États-Unis de fugitifs

Immigration irlandaise dans les villes du Canada

35,000 immigrants Canadiens français (Can. f.), surtout vers le Vermont et le Nord du Maine

Travail sur la ferme, dans l’industrie du bois, de la brique et du marbre (travail souvent saisonnier)


1839: 1er journal Can. f. aux USA  “Le Patriote” (VT)


1842: Traité Webster-Ashburton déterminant la  frontière Canado-Américaine (surtout du Maine)

1840

population (pop.)=690,000, 25% anglophone, 85% rurale 

natalité de 60/1000 habitants

Acte d’Union 1840: Québec + Ontario = Canada-Uni

1840: l’anglais est la seule langue officielle au Canada

1842-1843: crise économique au Québec

1846-1849: crise économique

1849: perte officielle du droit de vote (des femmes)

1840: rapport de Lord Durham prônant l’extinction de la nation Can. f. par l’assimilation

1841: loi de l’instruction publique

1842: 7% des enfants de 7-14 ans fréquentent l’école

1849: commission d’enquête sur l’émigration

70,000 immigrants Canadiens français

1ère vague d’industrialisation (et d’immigration)

Travail dans les filatures de coton, non-spécialisé,

dans des conditions difficiles avec un maigre salaire

Grand boom économique “victorien” du milieu du siècle qui culmine en 1857.

1854: traité de réciprocité économique avec le Canada, élémination des tarifs douaniers (sorte de libre-échange)

1857: dépression économique

1850-1860: “Know-nothing movement” anti-catholique

1850: 1ère paroisse Can. f. = Burlington, VT.

1860: seulement 10 paroisses Can. f.

1850

pop.=890,000


émigrants: 2/3 classe agricole, 9/10 d’origine Can. f. 


1852: Grand incendie de Montréal


1852: Fondation Université Laval (1ère Univ. Can. f.)


1854: fin du régime seigneurial

1860: 464 prêtres 


1853: Grands projets ferroviaires  canadiens vers les  États-Unis (“le great Western”, “le Granc Tronc”)


1857: 2ième commission d’enquête sur l’émigration

100,000 immigrants Canadiens français

44% vers le Vermont

1865-1873: plusieurs épidémies de choléra, fièvre typhoïde, fièvre jaune, variole, scarlatine


1861-1865: Guerre de Sécession(30,000 soldats Can. f.).

Vers la fin de la guerre et après: retour en force de l’immigration des Can. f. suite au boum économique et augmentation des salaires.

1864: train de Montréal à Lowel, MA= 5 jours de voyage. 

dans le Rhode Island: 66% population est urbaine

1868: création du journal “Le protecteur Canadien”  (Burlington, VT) axé sur la religion et les activités  culturelles des Can. f. aux USA (par rév. Druon)

1869: début journal “L’idée Nouvelle” (journal sécessionniste du Québec)

1860

pop.=1,112,000

1/3 des enfants nés à Montréal meurent dans 1ère année de vie, les enfants Can. f. ont un taux plus élevé de décès  (aucune amélioration de 1860 à 1900).


Diminution de l’émigration pendant la guerre et augmentation de l’immigration au Canada (réfugiés et déserteurs des États-Unis)

période de prospérité au Canada


1867: Acte de l’Amérique du Nord:  Confédération  

(incluant: Québec, Ontario, Nouveau-Brunswick,  Nouvelle-Écosse), le français reprend titre de  langue officielle


1862 et 1868: commissions d’enquête sur l’émigration

120,000 immigrants Canadiens français

44% se dirigeant vers le Massachusetts


1871: Honoré Beaugrand fonde “L’Écho du Canada”


1873-1879: dépression économique, baisse des prix et des salaires, baisse de l’immigration

67% des enfants de Lowel, MA de < 16 ans travaillent


1872: 1ière  paroisse can. f. à Woonsocket, RI

1874: début du journal “Le travailleur” (fondé par Ferdinand Gagnon)

1870

pop.=1,192,00, en 1873= 77% rurale 

1871: le Nouveau-Brunswick vote le “Common School Act” supprimant les écoles françaises.

1873-1896: dépression économique extrême.

1874: Fête de St-Jean Baptiste devient fête nationale des  Québécois.

1876: création du Bureau de santé de Montréal

1875: Loi de rapatriement des Can, f. est un échec, les conditions économiques ne sont pas mieux qu’en N-A

1875: paroles célèbres de Georges-Etienne Cartier (un  des chefs de l’insurrection de 1837) “Let them go, it is the rabble which is leaving” (Perreault, p. 16).

150,000 immigrants Canadiens français

2ième vague d’industrialisation

lois pour uniformiser les conditions de travail


travail dans les filatures de coton et aussi de laine


1881: formation Société Jacques-Cartier (RI) pour  promouvoir le fait français


1880: Massachusetts Bureau of Statistic of Labor  présente les  Can. f. comme “Chinese of the East”


1883 et 1889-1894: graves récessions

1880

pop.:1,927,000


1888-1890: mauvaise récoltes, des familles entières commencent à émigrer vers les États-Unis


1884: Fondation du Journal “La Presse”

1885: épidémie de variole (+>5,800 morts à Montréal)


1880: 2120 prêtres (510 per capita)

1885: pendaison de Louis Riel


tentatives de rapatriement des Can. f. infructueuses

140,000 immigrants Canadiens français

1891 et 1894-1896: deux crises économiques avec diminution des prix, des salaires et grèves (crash  boursier).

(“La panique de 1893": crash boursier précédant la crise)


1896 à 1914: 3ième vague d’industrialisation

1896 à 1913: grande période de prospérité 

1890-1925: les Américains entretiennent une peur du  communisme et de ce fait des étrangers, dont les Canadiens français (peur culmine en 1918, “Red Scare” suite à la Révolution en Russie).

1890: La législature du NH compte 10 Can. f.

1896: L’Association Canado-Américaine et L’Union  Saint-jean Baptiste d’Amérique sont deux  puissantes sociétés franco-américaines, jouant  aussi le rôle de compagnie d’assurance fraternelle

1890

pop.:2,114,000, 66% rurale  (pop. MTL, 1891= 220,000)


De 1849 à 1880, l’eau “potable” de Montréal venait d’un réservoir de 3 millions de gallons (Carré St-Louis)


Début des infrastructures d’aqueducs et d’égouts de MTL


Mouvements nationalistes en plein essor avec Henri Bourassa et Lionel Groulx à leurs têtes


1890: Français abolit dans les écoles au Manitoba


1896: 1er Premier Ministre Can. f. au canada: Sir Wilfrid Laurier.

100,000 immigrants Canadiens français

Population estimée de 1,200,000 d’origine Can. f.


Fall River, MA est la 3ième ville française d’Amérique après Montréal et Québec (pop. Can. f. = 33,000)


Woonsocket, RI est 60% Can. f. (pop. Can. f. = 17,000), 4ième ville française d’Amérique, possède 5 paroisses. 


50% pop.du RI est catholique (200,000/428,556)


1904: fondation du Collège l’Assomption  (Worcester, MA)

Formation d’une identité culturelle:  les “Petits Canadas”

1900

pop.:2,183,000, 66% rurale

Pop. estimée de 1,800,000 francophones


1901: premier syndicat catholique

1901: loi interdisant le travail d’enfants dans les usines


Augmentation significative de l’immigration vers le Canada en provenance de l’Europe

1984 religieux et 6628 religieuses 

518,887 Can. f. = 9.3% pop. de la Nouvelle-Angleterre


1907: Rév. Georges-Albert Guertin: 1er Évêque Can. f.              (diocèse Manchester, NH)


1908-1928: Aram-J. Pothier, élu Gouverneur de l’État  du Rhode Island à 6 occasions.


Salaire dans filatures: $5/semaine (pour 14 heures /jour)                                   (Coût petit loyer = $5/mois)

suite

1900



80,000 immigrants Canadiens français

1910: école obligatoire pour tous les enfants  < 12 ans

1911: Hugo-A. Dubuque est nommé  “Justice of the  Superior Court in MA”

1916: épidémie de poliomyélite

1918: épidémie mondiale de “La grippe espagnole” 1914-18: 1ière Guerre Mondiale (armée=100,000 Can. f.)  1919-1920: crise économique due à l’inflation et la  diminution des salaires. 

1918: propagande anti-Allemande et anti-ethnique.

Les étrangers sont considérés “Un-American”

1918: lois pour limiter l’enseignement du français dans  les écoles paroissiales. 

Les filatures se déplacent lentement vers le Sud.

Ascension lente et graduelle des Can. f. dans l’échelle sociale.

1920: 19ième Amendement de la Constitution reconnaît               le droit de vote aux femmes.

1910

pop.:2,527,000

1910: grande épidémie de fièvre typhoïde: décision de  chlorer et de filtrer l’eau.


1910: Henri Bourassa fonde “Le Devoir”


1915: loi restreignant l’usage du français dans les écoles bilingues de l’Ontario (règlement XVII, 1912).


1918: 1ère usine de filtration de l’eau à MTL

1914-1918: 1ière Guerre Mondiale (peu de Can. f.). 1917: Conscription (mouvement québécois contre)


1918-1920: Grande prospérité suite à la guerre, mais  aussi inflation élevée jusqu’en 1920.

Lionel Groulx prône l’indépendance du Québec.


1919: “Dominion Elections Acts”: droit de vote universel au Fédéral (incluant les femmes).


2462 prêtres (652 per capita)

130,000 immigrants Canadiens français

les États-Unis = première économie mondiale

1920: “Sentinel affair” (en bref, controverse sur la levée  de taxes paroissiales pour la construction d’écoles            catholiques anglaises de niveau supérieur) 

1922: plusieurs grèves due à la diminution des salaires

1920: loi d’immigration limitant le nombre d’immigrants

          

1929: début de la Grande Dépression, “Crash” boursier 

1927: 620 prêtres, 239 écoles, 32 couvents, 5 collèges 

au Massachusetts: 270 prêtres, 849 religieux et religieuses, 78 églises, 6 couvents, 2 collèges, 81 écoles, 3 hôpitaux, 3 orphelinats.

1920

pop.:2,834,000, 44% rurale (pop. MTL, 1921= 420,000)


1922: CKAC: 1ère radio de langue française au Québec


1921-1926: grande récession au Québec, vague de départ  vers les États-Unis

1930: Loi américaine anti-immigration

1932: radio française aux USA= WFEA-AM (Manchester NH)

1930

pop.:2,875,000, presque 85% francophone, 37% rurale

(>900,000 immigrés Can. f. en 80 ans, mais plus de 30 millions d’Européens durant la même période)


Début de l’isolement du groupe Franco-Américain


retour au Québec du 1/3 de l’émigration des années 1900-1930 (soit 100,000 personnes approximativement).


1940: retour du droit de vote des femmes au Québec

Abréviations:

        Can.F.= Canadiens français

        MA= Massachusetts , MTL= Montréal

        N-A= Nouvelle-Angleterre, NH= New Hampshire        

        pop.= population

        VT= Vermont

         RI= Rhodes Island


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Tableau II

Émigration des Québécois vers les États-Unis de 1840 à 1930.


     En utilisant un tableau du taux d’émigration des Québécois vers les États-Unis et un tableau pour estimer le pourcentage de francophones au Québec, nous pouvons mieux comprendre le taux élevé de  francophones ayant quittés le Québec (en assumant que ceux qui partirent du Québec étaient surtout francophones (9/10)). 

    

Période

Émigration

du 

Québec

taux d’émigration

  %

(année)                                               

population du Québec      

%francophones       

%francophones émigrants

1840-1850

35 000

                                        5   

(1844)                                                                                                          

         690,000                                  75                                               6.7 

1850-1860

70 000

          8

(1851)                                                                                                         

         890,000                                  75                                              10.5 

1860-1870

100 000

          9

(1861)                                                                                                       

        1,112,000                                75                                              12 

1870-1880

120 000

                                       10

(1871)                                                                                                      

        1,192,000                                80                                             12.6

1880-1890

150 000

 8      

(1881)                                                                                                       

        1,927,000                                82                                               9.5

1890-1900

140 000

                                         7    

(1891)                                                                                                        

        2,114,000                                82                                              8.1

1900-1910

100 000

          5

(1901)                                                                                                       

        2,183,000                                83                                              5.5

1910-1920

80 000

                                         3

(1911)                                                                                                       

        2,527,000                                84                                             3.4

1920-1930

130 000

 5     

(1921)                                                                                                       

        2,834,000                                 85                                             5.4

1930-1940

-

-

(1931)                                                                                          

        2,875,000                                 85

~0

1840-1940

900 000


Émigration totale de 900,000 pour  une population francophone estimée de 

(85% X 2,875,000) 2,444,000

 

~  35% de la population francophone du Québec de 1931.



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CARTE :          
 POPULATION FRANCO-AMÉRICAINE EN 1900


Source: Claire Quintal, Steeples and smokestats: a collection of essays on the Franco-American experience in new England, Worcester, MA, Assumption College, Institut français, 1966, 683p., p.69.



______________________________


TABLEAU I :
Population et rang de certaines des plus grandes villes des États-Unis et nombre de Canadiens Français.


En 1850:


Rang        Ville                         POPULATION


3 Boston city, MA *.................. 136,881

22 Lowell city, MA.......................  33,383 

52 Manchester city, NH................  13,932

57 Fall River town, MA................  11,524 

81 Lawrence town, MA................    8,282 


En 1900:                                                                                         


Rang         Villes                      POPULATION              Nombre de Canadiens Français 


5   Boston city, MA.................... 560,892      5,800 (1%)                      

29  Worcester city, MA................ 118,421 15,300 (13%)

33  Fall River city, MA............... 104,863 33,000 (32%)

39 Lowell city, MA.....................  94,969         24,800 (26%)

57  Lawrence city, MA................. 62,559         11,500 (13%)

58 New Bedford city, MA........... 62,442         15,000 (24%)

65 Manchester city, NH............... 56,987         23,000 (40%)

82 Holyoke city, MA................... 45,712         15,500 (34%)


     Woonsocket, RI....................... 28,333          17,000 (60%)

___ Lewiston-Auburn,ME............+ 30,000         13,300 (46/18%)

___ Biddeford-Saco.......................+ 20,000         10,650 (62/16%)


1 Source:Campbell Gibson, ”POPULATION OF THE 100 LARGEST CITIES AND OTHER URBAN PLACES IN THE UNITED STATES: 1790 TO 1990", U.S. Census, Washington, D.C., Juin 1998.  Disponible [En ligne]:<http://www.census.gov/population/documentation/twps0027/tab13.txt>  (15/02/2004).


2 Source: Gérard J. Brault,”État présent des études sur les centres Franco-Américains de la Nouvelle-Angletterre”, Vie française. Québec, 1980, pp. 11-12.  Disponible [En ligne]:

<http://www2.marianopolis.edu/québechistory/maps/cities.htm>  (12/02/2004).

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TABLEAU  IIILes Canadiens Français en Nouvelle-Angleterre, 1860-1930.


     Le tableau suivant est basé sur les donnés puisées de sources sures et vérifiées, en combinant les informations du ”U.S. Census Bureau” et les tableaux compilés par Leon Truesdell,  Ralph D. Vicero et Anthony Coelho.


États 

Nouvelle-Angleterre

(N-A)

Population  1860

de Canadiens Français

Population 1900

de Canadiens français

% en 1900 

  (Population de l’État)

Population 1930

de Canadiens Français

Maine

              7,490

          58,583

     8.4%  (694,466)

99,765

New Hampshire

              1,780

          74,598

     18%  (411,566) 

101,324

Vermont

16,580 

(44% de l’immigration Can. f.)

          41,286

     12%  (343,641)

          46,956

Massachusetts

              7,780

250,024     

 (44% de l’immigration) 

   8.8% (2,805,346)

         336,871

 (44% de l’immigration)

Rhode Island

             1,810

           56,382

     13%  (428,556)

91,173

Connecticut

             1,980

           37,914

       4%  (908,420)

67,130

           Total

           37,420

         518,887

       9.3% (5,591,995)

        743,219

  Franco-Américains de         la N-A nés au Canada  


         275,529 

          (53%)


       264,586                        (36%) 

% des Franco-Américains      nés au Canada en N-A. 


           70% 

   (275,529 sur 395,126)


          67%

 (264,586 sur 370,852)

 % de Can. F. relativement à  tous les immigrants aux                Etats-Unis


           5.8%

   (275,529 sur 4,762,796)


          3.7%

(264,586 sur 7,201,674)

        

 1 Campbell Gibson, Emily Lennon,, “Table 14.  Foreign-Born Population by Historical Section and Subsection of the United States:1850 to 1990" et “Table 4. Region and Country or Area of Birth of the Foreign-Born Population, With Geographic Detail Shown in Decennial Census Publications of 1930 or Earlier: 1850 to 1930".  Source: U.S. Bureau of the Census.


2  Leon Truesdell, The Canadian Born in the United States, New Haven, Yale University Press, 1943, p.77.  (Roby, pages 96 et 167).  Tableau sur les Franco-Américains de la Nouvelle-Angleterre nés au Canada (1890-1930).

3 Ralph D. Vicero, Immigration of French Canadians to New England, 1840-1900, Univesité du Wisconsin, 1968, p. 148 et p. 275.  (Roby, pages 21, 26 et  33).  Tableaux sur la distribution des Canadiens français en Nouvelle-Angleterre de 1860 à 1930.

4 Anthony Coelho, A Row of Nationalities: Life in a Working-Class Community: The Irish, English and French Canadians of Fall River, Massachusetts, 1850-1890, Brown University, 1980, p. 102.  (Roby, 1990, p. 61). Tableau du % des Canadiens français, et tous les groupes ethniques par rapport à la population totale en 1900.


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BIBLIOGRAPHIE:


BRISSON, Marcelle et Suzanne Côté-Gauthier, Montréal de vive mémoire:1900-1939, Montréal, Triptyque, 1994, 340 p.



LAVOIE, Yolande, L'émigration des Québécois aux États-Unis de 1840 à 1930, Québec, conseil de la langue française Québec, 1981, 68p.  Disponible [En ligne]:                                                    <http://www.cslf.gouv.qc.ca/Publications/PubD101/D101ch1.html> (03/01/2004).


LOUDER, Dean R., Le Québec et les francophones de la nouvelle-Angleterre, Saint-Foy, Québec, Presse de l’Université Laval, 1991, 309p.


MCROBERTS, Kenneth et Dale Posgate, Quebec: social change and political crisis, Toronto, McClelland and Stewart, 1976, 216 p.


PERREAULT, Robert B, One piece in the great American mosaic: the Franco-Americans of New England, Lakeport, N.H., André Paquette Associates, 1976,43p., reprinted from Le Canado-Américain, v.2, no. 2, avril-mai-juin, 1976. 


QUINTAL,  Claire, Steeples and smokestacks: a collection of assays on the Franco-American experience in New England, Worcester, Massachusetts, Collège l’Assomption, 1996, 683 p.


ROBY, Yves, Les Franco-Américains de la Nouvelle-Angleterre:rêves et réalités, Sillery, Septentrion, 2000, 526 p.


TRIGGER, Bruce, Les Indiens, la fourrure et les blancs, traduit de l’anglais pas Georges Khal, Montréal, Boréal, 1990, 542 p.



ARTICLES ET AUTRES DOCUMENTS:



BOURASSA, Henry, “Les Franco-Américains”, Le Devoir, septembre 1915, articles reproduits dans le bulletin de la Société Historique Franco-Américaine, vol 2, 1956, p. 158.  Disponible [En ligne]:                   

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TABLEAUX:



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et p. 33. 

Original picture from a glass negative:  research and reproduction by Dennis Fuller Chair of the Canaan Historical Society,  Canaan, Vermon...